Semaine 7 : Passe à l’aile.

Cette semaine, pour moi, le coup de barre s’est poursuivi, occasionnant une crise aiguë de Keskonfoulite, qui m’a tenue jusqu’à hier et a rendu l’étape du jour, pourtant canon et pas si difficile – dans les collines toscanes pleines de vigne et d’oliviers et de cyprès –

Qui ressemblait assez à ceci.

Qui ressemblait assez à ceci.

hyper éprouvante. Le pédalage avec la gorge nouée et les larmes aux yeux, c’est pas très pratique.

Curieusement, la douleur de la Keskonfoulite vient aussi du fait d’être assez lucide sur l’accumulation d’évènements extérieurs qui la provoquent. Manque de sommeil, fatigue physique, mauvaises nouvelles. Mais malgré ça, les questions soulevées ont le mérite d’être relativement insolubles, donc justifiées, donc déprimantes.

Ca fait un mois et demi qu’on est sur les routes, l’enjeu était aussi éducatif, y en a un parmi les monstres (suivez mon regard) qu’est rien qu’un gros perso et ça change pas, c’est pas la bonne solution ce voyage, qu’est-ce qu’on fout là. Il y a des gens qui nous ont gentiment avertis qu’on parle de nous dans la une presse, mais enfin pourquoi est-ce que les gens s’obstinent à lire ce blog qui pourrait avoir été écrit par Bernard Hinault, je voudrais tellement, oui, pouvoir tirer des grandes leçons de philosophie anthropologique de mon dérailleur, comme Chantal Delsol tu vois, sauf que tout ça a la profondeur des mémoires de Loana, qu’est-ce que je fous là. On voulait prier pour des tas de trucs, c’est quoi cette idée débile qu’on prierait mieux en ayant mal aux fesses et en prenant des douches froides dans les bois, on serait tout aussi bien dans notre canapé, qu’est-ce qu’on fout là. On se réjouissait à l’idée de faire l’école aux enfants, de remplacer l’Education Nationale et son ramassis de pédagogistes grotesques, et au final on fait passer chaque journée de boulot aux forceps, en se mordant 20 fois la langue pour ne pas hurler aux enfants de bouffer leurs bouquins, là tout de suite, qu’est-ce qu’on fout là.

Bref, aujourd’hui, je passe à l’aile.

Bon alors, ce voyage, c’est bien ?

N1 : Ouais. Mieux que ce que je pensais au départ. C’est plus facile, je me sens plus en sécurité que ce que j’imaginais, j’aime bien rencontrer des gens tous les jours, mais en Italie tu comprends rien alors c’est pas facile. La tente je suis bien dedans, j’aime bien, mais ça m’énerve de replier les affaires tous les matins, et de me peler à la sortie du sac de couchage. A part ça, ça va.

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N2 : Oui. Parce que c’est bien de pédaler, à part les montées, et non parce que l’école, j’ai beau avoir moins qu’en classe, c’est soûlant quand même, parce qu’il faut en faire plus par jour que dans une école normale. Changer de maison tous les jours c’est bien, sauf qu’il faut se lever tôt et que du coup c’est nul. Et puis des fois il fait froid quand on se lève. Je trouve qu’on n’a pas assez de repos.

N3 : Oui. Parce que je découvre des nouvelles choses et des nouvelles langues et aussi des nouvelles cascades parce que je me suis gamellé à 40km/h, et ça fait mal.

Donne-moi ton meilleur et ton pire souvenir depuis le départ.

N1 : Le pire c’est la journée après le fermier-dans-son-pré, quand il a plu tout le temps dans le Massif Central. Le meilleur, c’était chez le Père Péchu à Gênes, quand on a dîné avec lui et que le bébé jouait sur son balcon.

N2 : Le meilleur c’était chez l’ami de Papa, parce qu’il y avait plein de copains, qui m’ont montré des arcs et des flèches, et Matthieu était trop sympa. Le pire, c’est quand tu m’as versé de l’eau sur le sac de couchage parce que je voulais pas me lever.

N3 : Le pire c’est quand je me suis gamellé à 40km/h, et le meilleur c’était quand on était à la première étape chez Marie-Solange, parce qu’on a été bien accueillis et qu’elle était très gentille.

Donne-moi l’endroit où tu aurais pu rester pour toute ta vie.

N1 : tous les matins, dans mon lit.

N2 : Dans la Vallée de la Drôme, là où on a fait du canoë.

N3 : chez Marie-Solange. Nan, ceux qui avaient la piscine avec la souris morte dedans (ndlr : La belle dame), nan, en fait c’était chez les Colonna, avec les nouveaux copains Théo et Clara.

Le pire endroit où on est passés ?

N1 : Le camping avec le train et l’autoroute juste à côté (ndlr : mardi dernier).

N2 : La montée de 20km pour aller au Puy-en-Velay.

N3 : Chez le fermier-dans-son-pré, là où on était sous le hangar et qu’il a plu toute la nuit.

Et le vélo c’est comment ?

N1 : Bien. Mais fatigant. Grâce à ça, j’ai jamais été aussi heureuse de me coucher le soir.

N2 : Bien, sauf quand il y a des montées sous le cagnard et sous la pluie.

N3 : Bien. Parce que quand on monte on a la joie de redescendre, que comme ça on fait moins d’école, c’est ça qui est cool.

Et l’école, d’ailleurs ?

N1 : Ca par contre, c’est soûlant. Parce que vous nous mettez tout le temps la pression. Et je commence à regretter les commentaires débiles des profs de mon école d’avant. C’est bien aussi parce qu’il y a moins d’heures de cours. Mais c’est hyper concentré par rapport à une journée normale. Ca oblige à travailler. Et ça, bon… C’est trop dur.

N2 : Bof. Parce que je travaille trop, on me dit que j’aurai pas de dîner si j’ai pas fini, et ça m’énerve.

N3 : C’est plutôt bien. On a différentes matières et j’aime bien les maths. Mais c’est moins bien que l’école d’avant, parce qu’avant il y avait Macha Machin. Elle était mieux que toi pour expliquer les choses.

Comment ça se passe avec ta famille ?

N1 : Bien. Très bien. Mais c’est super étonnant parce que j’apprends à découvrir les gens de la famille plus en profondeur. Que n3 peut être adorable au fond. Que Papa fait très bien la cuisine (et parle très  bien italien, huhuhu). Que n2 peut être très serviable mais seulement quand il veut. Que toi t’es trop forte pour manœuvrer la voiture avec la remorque, et que n4 grandit trop vite.

N2 : Comme j’ai les parents sur le dos c’est chiant, mais sinon quand tout le monde est sympa et de bonne humeur ben c’est bien. C’est pénible d’entendre le bébé se réveiller le matin avant nous.

N3 : Plutôt bien. Parce que quand j’ai fini mes devoirs je peux m’amuser avec les autres. C’est pas trop dur d’avoir les parents tout le temps sur le dos.

Et Dieu dans tout ça ?

N1 : J’arrive mieux à prier, je suis plus concentrée et je peux y consacrer plus de temps. Et j’aime beaucoup. J’aimerais bien garder cette fréquence de prière toute ma vie, mais quand on n’est pas en pèlerinage, ça marche jamais. Alors j’en profite pour rattraper le temps perdu, là.

N2 : Je sens Dieu plus proche pendant ce voyage, parce qu’on s’approche de Lui, et quelquefois j’ai l’impression qu’Il me dit que c’est bien.

N3 : Le pèlerinage, ça m’aide un peu plus à prier.

Encore un petit truc à dire ?

N1 : En vélo on a fait des trucs dont on se serait vraiment pas cru capables. J’en suis fière. Ca me donne une grande estime de la famille. Et de moi.

N2 : Quand n1 et n3 se battent, moi aussi je me fais engueuler, et ça c’est dégueulasse.

N3 : J’ai envie que tout le monde reste en un seul morceau. Je souhaite d’arriver à Jérusalem.

N4 : Tcha.

Voilà voilà. A la prochaine.

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13 commentaires pour Semaine 7 : Passe à l’aile.

  1. VP&BP dit :

    Et bien voilà !
    Rien que pour les réponses à  » Et Dieu dans tout ça  » ce pélé il valait le coup !
    Et chez ceux qui ne sont pas en pélé il y a aussi des crises de Keskonfoulite alors continuez .

  2. Cécile dit :

    Génial, numéro 1, 2, 3!!!!!
    Courage courage bientôt Rome!!!

  3. Tante Moyüe (l'autre) dit :

    La Keskonfoulite atteint par capillarité ta filleule, en tout cas à chaque fois qu’on passe à table et qu’il y a des LEGUMES, c’est-à-dire grosso modo à tous les repas.

    Mais POURQUOI tu fais TOUJOURS des trucs que j’aime PAS ?
    Mais maman, ces LEGUMES que tu fais, c’est vraiment pour me faire BISQUER ?
    Mais on peut RIEN manger d’AUTRE que des légumes ? Les nouilles, ça n’existe PAS ?

    Voilà, ça ne résoudra pas ta keskonfoulite à toi mais c’est juste pour te montrer qu’elle souffre avec toi : )
    Je pourrais lui dire que sa marraine a besoin de prières, ça éviterait peut-être quelques comportements inappropriés à la messe (genre : je mets mes pieds le plus haut possible sur le banc de devant histoire de montrer ma culotte à tout le monde).

    • Cette Grand dit :

      J’vais te les envoyer à Jérusalem en vélo moi tous ces sales gosses, ça va nous les calmer un peu moi j’vous dit. On va leur montrer la photo d’Hareng après sa gamelle, ça va les aider à finir la leur.
      Bises, et courage!

  4. Annepersil dit :

    Ouaich, c’est sûr, de notre canapé, on a moins l’impression de se demander ce qu’on fout là, encore que.
    Moyüe, regarde-moi bien, là, dans les yeux, j’ai dit les yeux.
    Vous avez choisi une voie compliquée, une voie d’excellence pour gravir la colline de Dieu. Alors, oui, c’est la merde aujourd’hui, et hier, et peut-être demain. Mais les soucis, ceux pour lesquels vous ne pouvez rien, tu serais dans ta jolie petite maison, ça ne changerait pas grand chose.
    Retourne-toi sur ces dernières semaines. Qui peut se vanter d’avoir réussi cet exploit, déjà ? Quelques aventuriers parmi lesquels vous comptez désormais.
    Et les enfants donnent un bilan très enthousiaste. Vraiment.
    L’école à la maison, sous la tente, ou à l’école, ça reste chiant, je confirme, même son de cloche par ici. Se lever le matin aussi, je le signale !
    Allez, Morue, balance un peu de ton fardeau à qui tu sais Là Haut, on va se charger de faire passer le message, et on continue à bien penser à vous, à ce calendrier qui déroule, à ces kilomètres que vous avalez dans la vitesse, le croûtage (ouille, pauvre chat N3 ) et parfois les larmes.
    Chaque nuit passée sous la tente, chaque douche froide sous un filet d’eau du jerrican vous rapproche du but. Bientôt Rome ! Puis au loin, Jérusalem, on trépigne d’impatience.
    Mille bises à partager !

  5. Chiara dit :

    Merci, Merci de tout ce que vous faites. Je ne vous connais pas et sans doute que l’on ne se croisera jamais (j’habite sur la côte ouest des États-Unis) mais vous me donnez une pêche incroyable quand je repense à votre courage, votre humour, vos témoignages. Continuez, priez pour nous coincés dans notre petit confort qui nous étouffe. Et vive la communion des saints qui nous permet de nous rejoindre par delà les océans et les montagnes.

  6. le fan club de la saumonnerie dit :

    Excellent tout ça !!! ça valait le coup , ça burine, ça burine…. a quel prix,? sachez qu’on le partage ce prix là , car chaque jour un pet de travers ? et hop on se dit la saumonorie est en marche donc on a pas le droit d’être l’eternel français râleur . Les petits du fan club de la saumonerie continuent à vous porter au quotidien, et dès qu’ils ont le pied par terre le matin, car rassurez vous ici le matin on a froid aussi, il pleut (je constate que sur vos photos vous avez du beau soleil ) faut qu’on bosse, qu’on doit supporter son frère ou sa soeur ch…….. mais la vie est belle car Il nous aime !!!
    Tout ça pour vous dire vous n’êtes pas seuls nous sommes là !!!
    que Dieu vous garde et que les 7 dons du st Esprit vous soient donnés en plénitude
    Grande Union de prières et à très vite .

    le « fan club international de la saumonerie »

    ps : lundi matin reveil à 5 h 45 oblige pour aller voir les news de la saumonerie.c’est pas du soutien ça ?

  7. Géraldine d'Ouince dit :

    Hello,
    Je n’en reviens pas de la forme de vos enfants ! Tenez-bon ! C’est comme un marathon : le 2nd souffle est compliqué à trouver puis après tu prends ta vitesse de croisière. Ce qui te laissera plus de temps et d’énergie pour tout le reste.
    On pense à vous

  8. Anne-Persil dit :

    Aujourd’hui, je lis un article dans un torchon peu recommandable (FC !) qui parle de la rentrée, et de la vertu de la Force. Je tombe en arrêt, bouche bée, ridicule devant cette citation du CEC, à la référence 1808 : « la force est la vertu morale qui assure dans les difficultés la fermeté et la constance dans la poursuite du bien » (fermeté de l’âme, pas du mollet, Moÿue, tu ne t’en sortiras pas comme ça !)
    Un truc de plus à méditer, merci qui ???
    Pense aussi à ta filleule qui se tape des légumes à chaque repas ET des probiotiques…
    Mille bises à partager. Tcha !

  9. henri dit :

    bravo! n 3devrait poser dans magazine super photo!!!!

  10. Salut la famille poisson véloteur ! Je reprends le fil que j’avais laissé de coté suite aux vacances et diverses activités estivales. En effet nous aussi avons été en pèlerinage… à Lourdes, en train. Y’a moins de mérite, mais je ne désespère pas d’y aller un jour en vélo comme #1 et #3, car voyez-vous je me suis mis également au vélo.
    Vous me faites toujours autant marrer mais pas que, j’apprends, du moins, j’essaye en vous lisant à être un « bon chrétien ». Voilà ! Je prie pour vous et pense bien à vous. Bises

  11. Dabas Emeline dit :

    Je vous souhaite un bon voyage et j’espère que N1 n’est pas trop fatiguée!
    Bisous

  12. Xagazougoune dit :

    Génial de vous suivre toutes les semaines et de dessiner sur nos visages ce petit sourire qui dit: « prends ce post dans ta face »

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